Améliorer la mesure de l'incidence et de la sécurité des avortements : Innovations méthodologiques et études empiriques récentes

Mombasa, Kenya, 19-21 novembre 2024

 

Le séminaire international “Improving measurement of abortion incidence and safety: Innovations in methodology and recent empirical studies” s'est tenu à Mombasa, Kenya, du 19 au 21 novembre 2024, organisé par le Comité scientifique de l'UIESP sur la recherche en matière d'avortement.   

 

 

La recherche sur l'avortement, et en particulier la mesure de l'incidence et de la sécurité de l'avortement, reste une priorité majeure et bénéficierait considérablement d'échanges scientifiques. Deux facteurs continuent d'évoluer et d'influer sur les besoins de mesure.  Le premier est la loi concernant l'avortement et sa mise en œuvre : Alors que les lois sur l'avortement ont continué à changer dans de nombreux contextes, le plus souvent dans le sens d'un élargissement des critères selon lesquels l'avortement est légalement autorisé, dans certains pays, les critères légaux sont devenus plus restrictifs.  En outre, la mise en œuvre des changements législatifs peut avoir lieu dans certaines parties d'un pays, mais pas dans toutes les provinces ou tous les États.  Le second facteur majeur concerne les avortements clandestins utilisant des méthodes relativement sûres, telles que l'avortement médicamenteux, et dans quelle mesure ils sont de plus en plus utilisés.  L'évolution de la légalité et de l'accès à des services d'avortement sûrs ou plus sûrs nécessite de nouvelles méthodologies ou l'adaptation des méthodes précédemment utilisées pour mesurer à la fois l'incidence et la sécurité. En outre, dans les contextes où l'avortement était largement légal et où la loi est aujourd'hui restrictive - comme c'est le cas dans un grand nombre d'États américains - les méthodologies utilisées par le passé pour documenter l'incidence de l'avortement ne sont plus adéquates, et de nouvelles approches doivent être développées ou adaptées. Ces changements soulignent la nécessité d'améliorer les méthodes de mesure de l'incidence et de la sécurité des avortements afin d'évaluer dans quelle mesure les services légaux et sûrs sont utilisés et d'identifier les groupes qui ont un accès inéquitable à des services d'avortement légaux et sûrs. Ils soulignent également l'importance de supprimer les cloisonnements géographiques dans la recherche sur l'avortement, afin que les chercheur·es qui travaillent dans des contextes juridiques différents puissent tirer parti de leurs expériences respectives pour élaborer de nouvelles approches innovantes.

 

L'objectif de ce séminaire était de permettre aux chercheur·es de discuter de leurs travaux sur des méthodes innovantes pour mesurer l'incidence de l'avortement, la sécurité de l'avortement et la morbidité associée, ainsi que l'impact de la législation sur l'avortement. Le séminaire visait à réunir des chercheur·es qui développent et testent différents modèles d'étude, méthodologies et approches. Les études présentées ont été mises en œuvre dans divers contextes de législation sur l'avortement, allant de ceux où l'avortement est largement légal à ceux où l'avortement est fortement restreint par la loi et où il est plus difficile d'avoir accès à un avortement sûr.

 

 

Au total, 21 communications ont été sélectionnées pour être présentées lors du séminaire, dans le cadre de 6 séances.  

 

  • Deux de ces séances étaient consacrées à des communications sur des approches indirectes de la mesure de l'incidence de l'avortement, notamment une évaluation d'une méthode (ATPR, Anonymous Third Party Reporting) et des adaptations d'une autre méthode (AICM - Abortion Incidence Complications Method) pour mesurer l'incidence dans quatre contextes différents : dans des contextes humanitaires en Afrique de l'Est ; dans une zone sous-nationale (un État du Nigeria) ; aux États-Unis après que la décision Dobbs ait entraîné des restrictions à la légalité de l'avortement dans de nombreux États, en mesurant les avortements médicamenteux autogérés ; et enfin, dans deux contextes restrictifs (Kaya, au Burkina Faso et Kenya). L'échantillonnage fondé sur les répondants a été utilisé pour mener une enquête auprès des femmes afin d'améliorer la mesure d'un élément clé de la méthodologie AICM, le multiplicateur ou le nombre de femmes qui ont subi des avortements sûrs (c'est-à-dire qui n'ont pas eu de complications nécessitant une intervention chirurgicale). Le multiplicateur ou le nombre de femmes qui ont avorté en toute sécurité (c'est-à-dire qui n'ont pas eu de complications nécessitant un traitement dans un établissement) pour chaque femme qui a été traitée pour des complications dans un établissement de santé.  
     
  • Une séance s'est concentrée sur les approches directes pour mesurer l'incidence de l'avortement : une communication a évalué les résultats d'enquêtes nationales à grande échelle qui ont interrogé les femmes sur leurs avortements ; et deux communications ont abordé des questions basées sur une enquête auprès des femmes dans les camps de réfugiés Rohingya au Bangladesh - sur les perceptions des concepts interdépendants de planification familiale, de fausse couche et d'interruption de grossesse, et pour la seconde, sur les problèmes qui affectent la collecte de données sur l'avortement dans ce contexte humanitaire complexe.  
     
  • Deux séances se sont concentrées sur la mesure de la morbidité due aux avortements à risque et sur la sécurité des avortements. Les communications ont abordé les questions suivantes : sécurité et efficacité de l'avortement médicamenteux autogéré ; tendances des taux de traitement des complications de l'avortement et des comportements en matière de recherche de traitement ; relation entre les lois sur l'avortement et la morbidité liée à l'avortement ; mesure de la sécurité de l'avortement à l'aide de données collectées par le biais de l'échantillonnage fondé sur les répondants ; classification en fonction de la sécurité ; et (sujet peu exploré) incidence des tentatives d'avortement infructueuses.  
     
  • Une séance a abordé des questions liées à l'évolution de la législation sur l'avortement et à son impact : où la loi est devenue plus restrictive (États-Unis), plus libérale (Argentine), variation du coût de l'avortement médicamenteux là où la loi l'autorise (Ghana), et évaluation de l'impact de la législation sur l'avortement en Amérique du Sud à l'aide de données de traçabilité numérique.  

En outre, le séminaire a inclus une séance sur les recherches en cours sur l'avortement à l'APHRC, afin de sensibiliser les participant·es à la recherche sur l'avortement au Kenya.  Par ailleurs, quatre experts ont été invités à participer au séminaire, notamment en animant une séance sur les « Avancées de la recherche sur la mesure de la sécurité de l'avortement et de l'incidence de l'avortement, et sur les travaux futurs nécessaires ».

 

 

Les 21 communications présentées lors du séminaire portaient sur des recherches innovantes concernant la mesure de l'incidence de l'avortement, la sécurité de l'avortement et la morbidité liée à l'avortement. Les communications couvraient différents pays et contextes. Les communications axées sur la méthodologie présentaient les résultats de l'application de méthodes novatrices et/ou de l'adaptation de méthodes existantes pour mesurer l'avortement, principalement au niveau national ou infranational. Les communications présentées répondaient à la nécessité d'améliorer la mesure de l'incidence et de la sécurité des avortements, aux limites des méthodes existantes, aux changements législatifs, à la mise en œuvre inadéquate des critères juridiques existants, à l'accès inadéquat et inégal à l'avortement sans risque en raison de lois restrictives sur l'avortement, à la forte stigmatisation et à la faible capacité des systèmes de santé à offrir des services de qualité qui répondent aux besoins des femmes. Dans l'ensemble, le séminaire a permis de réaliser des évaluations précieuses et d'améliorer les méthodologies existantes dans ce domaine, d'expliquer et de tester de nouvelles approches et de fournir de nouvelles bases scientifiques sur l'accès à l'avortement sûr et légal.

 

Les participants au séminaire comprenaient les auteurs des communications, des expert·es invité·es sur l'avortement, des collègues de l'APHRC-Nairobi et certains membres du comité de l'UIESP sur la recherche en matière d'avortement. Les participant·es devanient d'Amérique latine (5), d'Asie (2), d'Afrique subsaharienne (9), d'Amérique du Nord (12) et d'autres pays développés (3). Les participant·es étaient à divers stades de leur carrière - certain·es travaillant sur ce domaine depuis de nombreuses années, des jeunes ·es et les doctorant·es. 

 


 Comité scientifique de l'UIESP sur la recherche en matière d'avortement

  • Co-présidentes : Fatima Juárez (El Colegio de Mexico) et Susheela Singh (Guttmacher Institute);
  • Membres : Harriet Birungi (Population Council, Nairobi), Margaret Giorgio (Guttmacher Institute), Rishita Nandagiri (King’s College London) et Ndola Prata (School of Public Health, University of California, Berkeley)