VIe Congrès portugais de démographie

Lisbonne, Portugal, 13 et 14 octobre 2022

 

Par Paulo Machado et Lara P. Tavares 

 

Avec l'organisation du VIe Congrès portugais de démographie à Lisbonne (Portugal), en octobre 2022, l'Association portugaise de démographie (Associação Portuguesa de Demografia - APD) a permis un débat public sur les questions démographiques contemporaines. L'APD est composée d'universitaires et de spécialistes de la démographie qui, au cours des 20 dernières années, mènent des recherches dans les domaines démographiques au sein d’universités, de centres de recherche et d’instituts publics et privés.

 

La durabilité démographique a été identifiée par les organisateurs du Congrès comme un élément clé pour comprendre les transformations sociales. Ces transformations se produisent dans le monde entier, notamment dans les pays occidentaux qui connaissent une croissance démographique très faible, voire négative, un fort vieillissement et des déséquilibres générationnels sans précédent. Ce concept de durabilité démographique, qui doit encore être consolidé, relie des défis démographiques connus tels que le vieillissement des populations, les migrations internes et internationales et les faibles taux de natalité. L'objectif de la durabilité démographique est très clairement orienté vers une gestion des dynamiques qui ne sont pas favorables à la cohésion sociale territoriale et conduisent à des déséquilibres régionaux, ou à leur persistance, et qui constituent un défi pour le développement socio-économique. Au Portugal en particulier, la non-durabilité démographique peut être considérée comme une caractéristique structurelle de la société, une caractéristique qui persiste au cours de sa longue histoire.

 

(de gauche à droite) : Paulo Machado (président de l'Association portugaise de démographie), Francisco Assis (président du Conselho Económico e Social), Susana Peralta (professeur d'économie à Novasbe) et Francisco Mendes da Silva (avocat, spécialiste des questions fiscales).

 

Les 13 et 14 octobre, environ 150 auteurs (presque autant de Portugais que d'étrangers - ce qui a posé un défi logistique intéressant et a conduit le congrès à devenir hybride) ont abordé les questions démographiques contemporaines, enrichissant le congrès grâce au large spectre interdisciplinaire de leurs contributions : analyse démographique, démographie historique, économie, sociologie, sciences politiques, entre autres domaines. Ce fut stimulant de découvrir les recherches menées dans des pays aussi variés que le Brésil, l'Inde, la Russie, Israël, la Côte d'Ivoire ou l'Espagne, pour n'en citer que quelques-uns. 

 

Cependant, l'aspect le plus novateur de ce VIe Congrès a sans doute été l'espace accordé aux intervenants issus de décideurs politique : des parlementaires et des membres du gouvernement central, ainsi que des commentateurs politiques, des dirigeants d'organismes nationaux ayant des responsabilités dans la production et la diffusion de données démographiques, et un directeur du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA). De ce fait, ce congrès fut celui avec le plus d’intervenants sans formation démographique spécifique de toute l’histoire de l'APD. L'idée était de s'interroger sur le sens des politiques démographiques (notamment dans les discussions impliquant des parlementaires), mais aussi sur ce qui divise la gauche et la droite sur ces questions. Il convient de souligner l'intervention du chef du Parlement, Augusto Santos Silva, qui a placé les questions de population à un niveau supra-partisan, considérant les défis démographiques comme un objectif collectif. Augusto Santos Silva a également parlé de la nécessité de comprendre et d'étudier la réalité qui nous entoure avant d'en parler et de s'en émouvoir, mentionnant que l'un des principaux apports de la recherche et de la connaissance scientifique repose sur la capacité à mettre en relation différents phénomènes. Dans le même ordre d'idées, il a plaidé pour une approche interdisciplinaire de la réalité démographique, qu'il considère comme un pilier fondamental du développement humain. 

 

Vegard Skirbekk, professeur au Columbia Aging Center, Columbia University et chercheur au Norwegian Institute of Public Health, orateur de marque du Congrès.

 

L'orateur de marque du congrès, l'économiste norvégien spécialiste de la population Vegard Skirbekk, a évoqué la nécessité d'une nouvelle organisation sociale adaptée à un régime démographique de faible fécondité. Il a souligné que la fécondité fluctuera probablement à des niveaux assez bas, mais il a fait valoir qu'au lieu de se concentrer sur l'augmentation de la fécondité, qui est une entreprise très difficile, nous devrions nous attacher à bien la gérer. Il a souligné que nous devrions nous concentrer davantage sur l'amélioration de la santé et sur la manière de rester productif. Selon ses propres termes, « le vieillissement n'est pas une fatalité et dépend des investissements politiques dans la manière dont nous vieillissons (...) [donc] l'avenir sera caractérisé par une fécondité faible et tardive, ce qui pourrait être une très bonne chose ».

 

Ce congrès, organisé et soutenu par l'Institut des sciences sociales et politiques et le Centre d'administration et de politiques publiques de l'Université de Lisbonne, a permis de tester la pertinence du concept de démographie publique en tant que pratique scientifique visant à repousser les frontières disciplinaires de la démographie afin de s'adresser à des publics non universitaires. Elle s'inscrit dans une démographie sociale avec des préoccupations liées à la promotion de la culture démographique à la fois au sein de la population et, en particulier, auprès des décideurs politiques.

 

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